Requiem à la mémoire de la "PRM"
Après quelques disgressions sur le terrain de la politique politicienne, revenons en à un sujet monstrueusement technoïde : la réforme du code des marchés publics. Je n'irai pas ici me lancer dans une exégèse complète de cette réforme déjà largement commentée (et plutôt critiquée en général) par ailleurs. Je relève néanmoins que, tout en regrettant moi-même l'instabilité du droit dans cette matière, la réforme semble bien accueillie par les praticiens puisque, dans une large mesure, elle ne fait qu'offrir des marges de liberté supplémentaires aux acheteurs en créant de nouvelles procédures modernes ou en modernisant les anciennes.
Il y a toutefois un point qui me semble être presque passé inaperçu et qui mérite pourtant être relevé : le "nouveau" code des marchés publics supprime la notion de "personne responsable des marchés" (ou PRM pour les intimes). Ce concept, familier des praticiens de l'achat public, recouvrait un régime particulier de délégation, spécifique aux marchés publics, par lequel, la personne ayant autorité pour passer des marchés (le ministre pour les administrations de l'Etat), pouvait déléguer par arrêté sa signature ou ses pouvoirs en matière de marchés publics à un certain nombre de personnes, en précisant les catégories et les montants des marchés ainsi délégués. La PRM existait en droit des marchés publics depuis fort longtemps (je n'ai pas réussi à savoir exactement depuis quand, mais en tout cas très antérieurement à la réforme de 2001 qui l'avait consacrée dans l'article 20 du code).
Il semble que la justification de cette suppression soit assez simple : la PRM était un concept franco-français qui n'avait pas de justification au plan communautaire (il était inconnu des directives) et le système des délégations de pouvoir/signatures "de droit commun", récemment réformé et simplifié par le décret du 27 juillet 2005, permettait de faire face aux besoins en matière de marchés. De fait, le concept de PRM constituait un formalisme (de plus) spécifique à la matière des marchés publics, sans conséquence ni pénale (contrairement à ce que l'on disait parfois, la responsabilité pénale de la PRM restait appréciée en fonction des règles de droit commun), ni budgétaire, ni administrative. Et une simple circulaire du Secrétariat Général du Gouvernement a suffit pour rappeler le basculement de ce régime spécial vers le régime de droit commun.
Le mauvais coucheur que je suis ne peut néanmoins s'empêcher de manifester un léger regret... Les arguments juridiques ne sont en effet guère convaincants : ils étaient déjà valables en 2004, en 2001 et avant. En toute hypothèse, si rien n'obligeait à maintenir la notion de PRM, rien n'obligeait non plus à la supprimer. Or, au delà des considérations juridiques, un peu de sociologie administrative aurait il me semble amené à davantage de circonspection. En pratique en effet, la notion de PRM comportait pas mal de vertus pédagogiques dans la mesure d'abord où elle obligeait l'administration à s'interroger sur le choix de délégataires particuliers pour l'achat publics, ce qui la conduisait, souvent, à un "resserement" des compétences en matière d'achat autour de quelques personnes spécialisées. Par ailleurs, ces mêmes personnes ainsi délégataires se trouvaient, en fait sinon en droit, particulièrement responsabilisés et justifiaient ainsi d'une autorité particulière pour faire valoir les impératifs de respect de la procédure auprès de leurs collègues, voire de leurs supérieurs hiérarchiques.
On peut craindre au contraire que cette réforme emporte au contraire une certaine "banalisation" de la responsabilité d'achat qui sera ainsi mélangée dans le lot commun de l'ensemble des délégations de signature au risque de voir la responsabilité d'achat attribuée à des personnes ne justifiant aucune compétence particulière et ne se sentant aucunement "responsable" au sens moral du terme... Ce qui est tout de même paradoxal au moment où le gouvernement promeut, à juste titre, une professionnalisation de l'achat public...
Il est vrai qu'une solution existe (elle est du reste ébauchée par la circulaire du SGG évoquée ci-dessus) : elle consisterait à procéder en matière d'achats publics, et au moins au profit des "professionnels" de cette fonction, à des délégations de pouvoirs et non à des délégations de signature. Reste à savoir si l'autorité délégante (le ministre pour les adminsitrations d'Etat) acceptera de procéder à de telles délégations qui, on le sait, le privent de son propre pouvoir en la matière...
Le mauvais coucheur que je suis ne peut néanmoins s'empêcher de manifester un léger regret... Les arguments juridiques ne sont en effet guère convaincants : ils étaient déjà valables en 2004, en 2001 et avant. En toute hypothèse, si rien n'obligeait à maintenir la notion de PRM, rien n'obligeait non plus à la supprimer. Or, au delà des considérations juridiques, un peu de sociologie administrative aurait il me semble amené à davantage de circonspection. En pratique en effet, la notion de PRM comportait pas mal de vertus pédagogiques dans la mesure d'abord où elle obligeait l'administration à s'interroger sur le choix de délégataires particuliers pour l'achat publics, ce qui la conduisait, souvent, à un "resserement" des compétences en matière d'achat autour de quelques personnes spécialisées. Par ailleurs, ces mêmes personnes ainsi délégataires se trouvaient, en fait sinon en droit, particulièrement responsabilisés et justifiaient ainsi d'une autorité particulière pour faire valoir les impératifs de respect de la procédure auprès de leurs collègues, voire de leurs supérieurs hiérarchiques.
On peut craindre au contraire que cette réforme emporte au contraire une certaine "banalisation" de la responsabilité d'achat qui sera ainsi mélangée dans le lot commun de l'ensemble des délégations de signature au risque de voir la responsabilité d'achat attribuée à des personnes ne justifiant aucune compétence particulière et ne se sentant aucunement "responsable" au sens moral du terme... Ce qui est tout de même paradoxal au moment où le gouvernement promeut, à juste titre, une professionnalisation de l'achat public...
Il est vrai qu'une solution existe (elle est du reste ébauchée par la circulaire du SGG évoquée ci-dessus) : elle consisterait à procéder en matière d'achats publics, et au moins au profit des "professionnels" de cette fonction, à des délégations de pouvoirs et non à des délégations de signature. Reste à savoir si l'autorité délégante (le ministre pour les adminsitrations d'Etat) acceptera de procéder à de telles délégations qui, on le sait, le privent de son propre pouvoir en la matière...